Monsieur le Président,
Vous êtes chargé de présider le comité d'évaluation de la journée de
solidarité destinée à financer le financement des actions en faveur de
l'autonomie des personnes âgées ou handicapées.
Ce comité doit rendre un avis et faire des propositions au premier
ministre à la fin juin et à ce titre j'imagine que vous allez entendre des
personnalités susceptibles de donner une opinion objective sur ce sujet.
Ce qui m'inquiète dans la démarche d'analyse de cette journée, c'est
qu'à quelques rares exceptions près, je n'ai pas entendu, ni de la part des
opposants ni de la part du Gouvernement la première contrevérité à formuler par rapport à cette démarche,
à savoir :
le travail supplémentaire
n'est pas automatiquement générateur de richesse.
En effet, si je prends le simple cas de la petite mairie dont j'ai la
charge, le fait de faire travailler les employés un jour de plus ne fait
rentrer aucun euros. J'ai, à l'inverse,
une dépense de l'ordre de 320 euros à payer pour cette journée.
A ce sujet, Philippe Laurent, entre autres fonctions électives : maire
de Sceaux, évalue à 90 millions d'euros le montant du prélèvement auprès des
collectivités locales pour financer cette journée. Elles devront pour maintenir leur budget le répercuter dans la
fiscalité locale ou emprunter ajoute-il. (Journal du Dimanche du 15 mai)
Il est donc faux
de dire que "C’est la première fois que le financement d’une réforme ne repose pas sur
une augmentation des impôts, mais sur la solidarité" (Extrait du dossier d'information du
secrétariat d'Etat aux personnes âgées).
Sur le même schéma : l'inéquation travail=rentrée d'argent, le chiffrage
du surcoût pour les administrations,est évalué, selon Philippe Laurent à 400
millions d'euros.
C'est semble t-il donc une diminution de recette de l'ordre de 490
millions d'euros qui est infligée aux collectivités locales et Administrations,
compensée ou non par l'emprunt ou l'impôt mais de toute manière une perte
d'argent.
Les principes de financement choisis par le gouvernement sont donc en
partie inadaptés et les pistes écartées énoncées par le gouvernement sont à
l'évidence une réalité.
"Deux possibilités ont été écartées par
le Gouvernement :
- financer de nouvelles mesures en faveur
des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées sans recettes
nouvelles et donc en laissant se creuser le déficit et l’endettement public. Ce
n’était pas une option responsable au moment où notre pays doit au
contraire maîtriser ses dépenses publiques ;
- accroître les taxes et impôts pour faire
face aux besoins nouveaux. Ce n’était pas une option équitable dans la
mesure où le pouvoir d’achat des salariés s’en serait trouvé pénalisé."
(Toujours extraits du dossier d'information du secrétariat d'Etat aux personnes âgées)
Et puis, comment peut-on faire croire qu'en faisant travailler ses
employés 1 minute et 50 secondes de
plus par jour la SNCF va obtenir des
gains de productivité significatifs ?
A partir de ces faits,
j'aimerai, Monsieur le Président que le comité d'évaluation indique :
Par rapport aux recettes
Par rapport aux dépenses :
Que reste t-il réellement en faveurs de la
perte d'autonomie et du handicap ?
Une analyse de la
conséquence de cette suppression d'un jour férié mériterait aussi de
s'interroger sur les recettes de TVA, y a-t-il
par exemple une réelle baisse de l'activité des services à la suite de
la suppression du lundi de pentecôte?
Quant au fond, à
l'évidence l'intention du gouvernement est louable mais la prise en charge de
la perte d'autonomie et du handicap ne se fait
pas par le biais d'une journée de solidarité.
C'est une action
permanente et c'est sans aucun doute une des missions prioritaires de l'Etat. Son financement doit être assuré par les
recettes fiscales et les prélèvements existants en réduisant d'autant les
dépenses inutiles et les gaspillages.
Je suis persuadé
que les gains de productivité sont énormes en agissant sur ces deux leviers et
que le financement des besoins réels des français peut-être assuré sans
difficulté par cette entreprise.
Jacques Marseille
écrit dans son livre "le grand gaspillage" : "Comment faire pour que le marché politique
en France soit moins favorable à l'inflation de la dépense?"
Sans préjuger de
ce que seront vos conclusions, je voudrais néanmoins attirer votre attention
sur les propos de nos dirigeants. Pour beaucoup d'entre eux, cette journée de
solidarité a eu le mérite d'être créée, par exemple, soulignant "le courage politique" du gouvernement Raffarin, Jean-François
Copé observe que cette journée était une "première". "Le
principe est acquis. En ce qui concerne les modalités, cela passe par une
évaluation", a-t-il dit.
C'est
une erreur de croire cela, il ne s'agit pas de revoir les modalités d'un
accroissement du temps de travail "solidairement exceptionnel" un
jour par an, mais de financer des dépenses obligatoires de l'état sans
accroître directement ou indirectement la pression fiscale, les prélèvements
obligatoires ou les prix.
C'est
certainement une démarche plus compliquée, plus en profondeur également mais
c'est me semble t-il la seule qui s'inscrive dans la durée et qui reste
acceptable.
En
espérant que mes modestes réflexions retiendront l'attention de votre comité,
je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments
respectueux.
Jean-Pierre
HERMAN, maire de Saint Jean de Niost : Ain
J'adresse
copie de ce message aux parlementaires du département de l'Ain, au maire de
Sceaux, et à JL Caffier journaliste à LCI.